Aujourd'hui, dimanche le 6 mai 2012, j'ai mangé un hot-dog-frites à Alfred, village ontarien situé sur la rive occidentale de la rivière des Outaouais. Pour un natif de Port-Alfred-Saguenay comme moi, cette halte à mi-distance sur l'ancienne route Ottawa-Montréal revêtait un charme certain. Y a-t-il, sur notre débris d'étoile, tant de bourgs et villages qui ont cette chance de s'appeler Alfred? Je savais déjà qu'il existait un autre Port-Alfred en Afrique du Sud, face à l'océan Indien.
Alfred, Ontario, majoritairement francophone en passant, doit son nom à l'un des fils du roi Georges III. C'est en tout cas ce que la municipalité écrit sur son site internet. Port-Alfred, Afrique du Sud, s'auréole de l'un des fils de la reine Victoria. Port-Alfred, Saguenay, a été nommée en l'honneur de Julien Édouard Alfred Dubuc, fondateur de ma ville natale.
En 1917, Dubuc fonde à l'aide d'investisseurs anglais, Ha! Ha! Bay Sulphite, près de Bagotville (aujourd'hui arrondissement La Baie) au Saguenay, usine qui fabrique une nouvelle pâte chimique. Du même coup, il fonde la ville de Port-Alfred (aujourd'hui arrondissement La Baie), qui porte son nom, afin de loger les ouvriers à proximité des installations.
Le détail précité a son importance... Il est à l'origine de la venue à Port-Alfred de mon grand'père, François Dufour Bédais et de sa famille, dont mon père Roland et mes oncles et tantes Dufour.
Paradoxalement, Gibus, le destin des trois Alfred dont il est question ne fut pas particulièrement glorieux. Laisse-moi t'expliquer. Le fils de la reine Victoria a joint le parti nazi dès sa fondation, fut nommé général par la Wehrmacht, fut dépossédé de ses propriétés est-allemandes par les Russes et fut renié par sa patrie d'origine, l'Angleterre. Le fils de Georges III fut un illustre inconnu, aussi peu renommé que le marquis de Jonquière, dont l'unique exploit fut de donner son nom à la voisine de Chicoutimi. Quant à Julien Édouard Alfred Dubuc, il aurait été, selon Wikipédia, l'homme économique canadien-français le plus célèbre de son temps. On l'adulait autant en Europe qu'en Amérique. Ironie du sort, moins de cent ans plus tard, tout ce qui constituait le joyau dubuquien, «La Compagnie de Pulpe de Chicoutimi», et j'inclus ici les installations de Port-Alfred, de Chicoutimi, de Val-Jalbert et de Chandler, s'est perdu dans un oubli relatif, suite aux revers économiques qui marquèrent l'industrie des pâtes et papiers. Le moulin de Port-Alfred, le dernier survivant, vient d'être complètement démantelé. On a fait de Val-Jalbert et Chicoutimi des sites (trappes?) touristiques, tandis que Chandler, qu'on est en train de doucement débâtir, a cessé de fonctionner il y a plusieurs années.
À connaître un peu d'histoire, on peut se demander s'il vaut la peine de s'appeler Alfred...
Delhorno
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