samedi 3 décembre 2011

CLUB DE GOLF DE PORT-ALFRED. LE VIEUX NEUF. TROU #1


TROU #1

C'est évidemment sur le trou #1 que tout a commencé!  Nous venions à pied de la 5e avenue et montions la 4e rue jusqu'au chalet.  Celui-ci nous intimidait...  Nous osions à peine le regarder.  Il nous fallait ensuite escalader une colline pour atteindre le «tee» ou tertre de départ, lequel était exigu comme un timbre-poste.  Le rebord gauche du «fairway» était séparé du pacage des Tremblay Romaine par une clôture de billes de cèdre.  Le pacage, cimetière de balles perdues, était «out of bonds».  J'emploie le terme «pacage», mais à vrai dire, je n'ai jamais vu une vache fréquenter ce terrain dont la vocation, à tout le moins, resta obscure pendant plus de vingt-cinq ans.  Dieu qu'il était difficile d'y retrouver ses balles.  Le rebord droit du fairway était plus ou moins virtuel, se mariant avec le fairway du trou #9.  Quelques années plus tard, le club 4-H de Port-Alfred fut mandé pour reboiser certains endroits du terrain.  Ces gros érables qui séparent maintenant les trous #1 et #9 et dont le passé a été oublié ont été plantés par les 4-H à la fin des années 50.  A la marque de 200 verges, il y avait un ruisselet qui traversait le fairway de gauche à droite.  Les balles y étaient souvent injouables et c'est à cet endroit précis que nous apprîmes la signification des mots «ground under repair».  L'oncle Fernand appelait cette mini-tranchée un «ditch», vocable que je n'ai jamais oublié, qui me suit comme un réflexe de Pavlov sur toutes les allées de golf et me revient instantanément quand il le faut.   

Le rebord gauche du vert longeait la clôture de bois de cèdre, de sorte que le moindre «hook» et le moindre «pull» étaient sanctionnés sévèrement.  La droite du vert était gardée par d'énormes peupliers dont les racines déformaient la topographie du gazon.  Je me disais qu'ils poussaient là depuis la nuit des temps et nous faisaient réfléchir sur l'après-dix-huit...  On les a coupés il y a quelques années.

J'ai été un «sliceux» la majeure partie de ma jeunesse, sans savoir pourquoi.  J'en étais humilié.  J'étais jaloux des «hookeux» et de ceux qui avaient un «draw» naturel.  J'aurais eu besoin d'un mentor, d'un coup de main, d'un enseignant.  Ça n'existait pas en ces temps-là.  Ma drive se réveillait la plupart du temps sur le fairway #9, d'où le par était à peu près impossible à obtenir.  Je fus donc sur le trou #1 un spécialiste du «bogey» et du «double-bogey».

DD et moi vécûmes notre grosse part de désillusions sur le trou #1...  Commencer une partie de golf avec un double-bogey ou un triple demandait un ajustement mental d'importance et un énorme travail sur soi-même!

J'eus cependant mon heure de gloire sur le vert #1 un de ces soirs où l'on s'en attend le moins.  J'avais quitté Port-Alfred depuis plusieurs années.  Un tournoi de golf pour quatuors: notre capitaine était un Harvey d'Alma.  Le deuxième, Michel Simard, l'ex-as-lanceur de l'équipe de baseball de mon patelin.  Le quatrième, Julien Côté, notre ex-voisin de la 5e avenue.  J'évoluais comme troisième homme.  Mon jeu avait été très ordinaire toute la journée.  Nous étions en prolongation.  Trois équipes et trois longs putts pour le birdie.  Nous nous disions qu'aucune équipe ne calerait son putt.  La première équipe manqua son oiselet.  La deuxième, paradoxalement, le réussit.  Nous avions un coup roulé de plus de trente pieds à caler pour rester en vie.  Mes trois coéquipiers visèrent à gauche de la coupe et manquèrent le putt.  Moi, depuis mes dix ans, je savais que le vert #1 penchait du côté de la rivière à Mars et que,  d'où nous étions,  il fallait viser à droite du trou.  Je calai ce roulé!  Nous finîmes deuxièmes!
Ironie du sort,  j'avais été le seul à gager sur son équipe placée deuxième...  Je retournai à Chicoutimi avec la totalité de la cagnotte!  Plus de mille dollars.  Voilà!

Delhorno





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