Je ne la connaissais pas celle-là... Quand je l'entendis de la bouche de la CHERCHEUSE VERTICALE, j'arrêtai de respirer! Qui avait écrit ça? Romain Gary, à propos de son ami aviateur dans les FFL. L'émotion ne cessait de m'étrangler. Il me faudrait connaître davantage celui qui a pu accoucher de cette phrase. L'occasion s'est présentée il y a deux semaines. Renaud Bray, rue St-Denis. Un livre de poche.
Eh bien! C'est fait! LA PROMESSE DE L'AUBE. Je n'avais pas de préjugé. Et je me suis accroché, ou plutôt le livre m'a accroché. Belle écriture. Autobiographique. A la gloire de sa mère, dont le souvenir hante tout le volume. La deuxième guerre. Basé en Angleterre. Le groupe Lorraine. Y fut bombardier. Récompensé par de Gaulle, qu'il admirait.
Vie personnelle? Déplorable sous certains aspects. Un fils avec Jean Seberg, fils qu'il a négligé. Fils qui en a gros sur le coeur, qui a dû écrire un livre pour exorciser son passé, élevé par une servante qui l'aima comme une mère. Oui, Romain Gary, adulé par sa mère, n'a su s'occuper de son fils... Ce paragraphe aussi où il pactise allègrement avec l'inceste.
Quelques tirades inoubliables...
«On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné.»
«Elle avait des yeux où il faisait si bon vivre que je n'ai jamais su où aller depuis.»
«Il n'a pas sa rue à Paris, mais pour moi toutes les rues de France portent son nom.»
«La vérité meurt jeune.»
Deux prix Goncourt, Gary, le premier sous le nom de Gary, le second sous celui d'Emile Ajar. A su écrire beaucoup plus que je n'aurais pensé. LES RACINES DU CIEL, notamment. C'était important pour lui d'écrire. Sa mère le voyait en Tolstoï...
S'est suicidé en 1980. Une balle dans la bouche. Avait laissé un billet: «Aucun rapport avec Jean Seberg». Celle-ci s'était suicidée l'année d'avant. Avait dit à quelqu'un quelques années plus tôt qu'il ne vieillirait pas, qu'il avait conclu un pacte avec le bonhomme là-haut.
Je l'envie. Avec ma petite vie de chirurgien de province, saurai-je jamais m'élever à cette hauteur? Pas assez de talent...
Delhorno