lundi 25 juin 2012

PODIATRE

Vieillir...  J'ai dû consulter un podiatre récemment.  Nouvellement arrivé dans la cité de Maisonneuve, je ne connaissais personne, évidemment.  Recherche dans le bottin de l'Ordre des Podiatres du Québec.  Mes critères?  A distance de marche de l'Usine Mont-Royal.

Un rendez-vous en fin d'après-midi, donc.  Une officine fort simple, dont la réceptionniste est un réceptionniste presque chauve au sourire absent. Il me présente un questionnaire à remplir: deux pages.  Nom, adresse, médication, allergies, métier et «qui vous a référé?»  Ce à quoi j'ai répondu: «le hasard».

-Monsieur Delhorno!
-Oui, j'arrive.
-Vous devrez vous déchausser.  Les deux pieds.
-J'ai, madame, effectivement deux problèmes.

Le podiatre est une podiatre.  Blondinette.  N'ayant pas trente années.  Jolie.

Par respect pour mon corps septuagénaire, je ne relaterai pas ici les détails de son infortune.

-Ainsi donc, monsieur Delhorno, vous êtes chirurgien?
-Retraité, madame.  J'ai passé trente-cinq ans à l'hôpital de Chicoutimi.  Je travaille cependant à temps partiel au Nouveau-Brunswick.
-Moi, je suis originaire du Saguenay!
-N'est-ce pas?  De Chicoutimi!
-Non, de ville de la Baie.

J'éclatai de rire.  Ce grand rire sonore qui me plaît tant dans ces situations incongrues.

-De Port-Alfred, de Bagotville ou de Grande-Baie?
-De Port-Alfred.
-Quel hasard!  Je suis natif de Port-Alfred moi aussi.  Cinquième avenue.  Quel est le nom de votre père, madame Duchaine?
-Errol.
-Je suppose qu'il travaillait à la Consol?  A-t-il pu se trouver un nouvel emploi?
-Oui!  Et il est bien plus heureux.
-Je ne l'ai pas connu.  Trop jeune, je pense.  Mais...  comment s'appelait votre grand-père?
-Camil.  Il vient de se faire opérer dans le dos.  N'était plus capable de marcher.
-Camil Duchaine...  Il travaillait à la Consol, n'est-ce pas?  J'ai connu votre grand-père, madame, j'ai rédigé ses chèques de paie un été de temps au «Time Office»!  Je peux même ajouter qu'il était un des collègues de travail que mon père, Mutt Delhorno, affectionnait.  «It's a small world...»
-Le monde est petit, en effet.

Voilà.  Elle me régla mes problèmes à la perfection.  Ajouta qu'elle n'était pas retournée au Saguenay parce qu'elle s'y sentait à l'étroit.  Qu'elle avait appris son métier à l'UQTR, le seul endroit au Québec où c'était possible.  Qu'elle avait fait un stage de trois mois à New York, au College of Podiatric Medecine.  Qu'elle me reverrait quand je voudrais.

Delhorno






 

mercredi 13 juin 2012

LE GARS DE SAINTE-ROSE-DU-NORD

Ça s'est passé il y a 25 ans.  Je l'avais presque oublié.  Ça m'est revenu hier soir, tout bonnement, innocemment, sans signe avant-coureur.  Et je dois l'avouer, Gibus, c'est un mauvais souvenir.

A cette époque, j'aimais, les vendredis soir, assister aux joutes des Saguenéens de Chicoutimi.  Entre les périodes, je descendais sous les gradins, histoire de marcher un peu, de rencontrer des gens.

Georges-Aimé Grenon de Sainte-Rose-du-Nord m'avait été présenté par son frère Jean-Nil, professeur de mes garçons au Séminaire de Chicoutimi.  J'étais allé avec eux un hiver corder de la pitoune dans les montagnes de Sainte-Rose.  Georges-Aimé, à son tour, m'avait présenté sa fille Esméralda et le fiancé de celle-ci, Roger Simard.  Voilà pour les présentations!

Ce vendredi soir-là, entre la deuxième et la troisième, à ma grande surprise, Roger et Esméralda fumaient sous les gradins.  Je m'empressai d'aller les saluer.

-Docteur Delhorno, j'ai des douleurs dans la poitrine depuis quelque temps, et ça me prend à la gorge aussi.  
-As-tu remarqué si ces douleurs adviennent à la suite d'un effort?
-Pas particulièrement.
-Y a-t-il des «pris du coeur» dans ta famille?
-Non.
-Y en a-t-il qui «font du cholestérol» dans ta famille?
-Je ne pense pas.

Roger avait vingt-neuf ans.  Peu de chances à cet âge qu'il fût coronarien.  Par acquit de conscience, je lui prescris un examen de dépistage des maladies coronariennes, «un tapis roulant», m'assurant qu'il le passerait le plus tôt possible.

Fin-mai de cette année-là.  La page nécrologique du Quotidien.  On annonce le décès de Roger.  Vingt-neuf ans.  Je m'empresse d'appeler Jean-Nil.  

Roger était allé bûcher dans la montagne avec son frère.  De bonne heure le matin.  Avait dû redescendre  chercher un bidon d'essence.  Ne revenait plus.  Son frère, inquiet, redescendit lui aussi et le trouva mort à mi-chemin.

Je me présentai au salon funéraire le même soir.  A mon grand étonnement, Esméralda se mit à pleurer quand elle me vit et ne voulut jamais me voir.  J'ignorais pourquoi.

Roger Simard avait été convoqué pour son tapis roulant la semaine suivant notre entretien sous les gradins  de l'aréna.  Ironie du sort, le tapis roulant se détraqua au début de l'examen.  La technicienne avisa Roger qu'il serait rappelé incessamment, dès qu'on aurait réparé la machine.  Pour des raisons jamais élucidées, le nom de Roger Simard fut perdu au hasard des listes d'attente et il ne fut jamais reconvoqué.  Lui-même ne fit aucune démarche et surtout ne m'avisa jamais de l'incident.  Jusqu'au matin fatidique.  Esméralda trouvait sans doute que j'avais péché d'une façon ou d'une autre...  Ce qui expliquait sa réaction en me voyant au salon funéraire.

Roger Simard était un jeune homme affable; ses ancêtres lui avaient légué un visage d'acteur de cinéma.  Il était là ce samedi matin où j'ai cordé de la pitoune  avec Jean-Nil et Raymond dans la montagne de Sainte-Rose.  J'ai conservé des photographies de cette journée.

Delhorno

     

mardi 12 juin 2012

SAINT CLAUDE



Qui est Saint-Claude ?
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Saint Romain, ermite, vient s’établir au Vème siècle à Condat. Il est rejoint quelques temps après par son frère saint Lupicin. Peu à peu, sur une butte à la confluence de la Bienne et du Tacon, une petite communauté monastique se développe et s’organise.Oyend, 4ème abbé, met au point la règle du monastère. Sa sainteté et l’éclat qu’il donne au monastère lui valent une grande notoriété ; à sa mort, on vénère ses reliques. La ville de Condat devient Saint-Oyend-de-Joux, c’est-à-dire du Jura, avant de s’appeler définitivement Saint-Claude.Claude, abbé de Saint-Oyend-de-Joux, administre cette abbaye durant près de 50 ans, du milieu du VIIème siècle (vers 650) jusqu’à la fin du VIIème siècle (vers 695). Il est revêtu 7 ans de la dignité épiscopale, sans doute d’évêque claustral.

De son administration, nous savons qu’il cherche à subvenir aux besoins croissants de son abbaye et qu’il contribue à son développement et à son rayonnement. L’histoire apporte peu de certitude sur la vie et la personne de saint Claude. La tradition veut qu'il soit né à Salins d'une famille gallo-romaine et qu'il ait été évêque de Besançon. Cet homme, qui de son vivant mène une vie humble et rigoureuse, va connaître après sa mort une " renaissance " prestigieuse. En effet, 500 ans après sa mort, grâce à la conservation intacte de son corps, de nombreux pèlerins accourent vers l’abbaye où les miracles se multiplient. Le pèlerinage de Saint-Claude bénéficie alors d’une renommée égale à celle de Lourdes aujourd’hui. On peut citer parmi les pèlerins illustres le roi Louis XI, sainte Jeanne de Chantal et saint François de Sales. Le corps du saint thaumaturge est exposé deux fois par jour à la piété des visiteurs qui lui baisent les mains et les pieds. De nombreux miracles sont consignés dans des manuscrits et attestés par la présence de témoins, entre autres celui d’un enfant mort, ramené à la vie. C’est pourquoi, saint Claude est souvent représenté avec un enfant.
   

   

En 1754, plusieurs docteurs en médecine examinent le corps du saint et certifient son incroyable conservation. Avec la Révolution française, un délire iconoclaste s’empare des représentants du peuple. Le corps de saint Claude est brûlé en 1794 ; seul en réchappe l’avant-bras gauche, authentifié par un des médecins qui avaient examiné le corps cinquante ans plus tôt. Cet avant-bras est aujourd’hui encore conservé dans un reliquaire de la cathédrale.Curieux destin que celui de St Claude, qui de son vivant fait le choix d’une vie humble et retirée du monde, et qui après sa mort et 5 siècles de silence total, connaît une gloire humaine hors du commun, entraînant à sa suite, des milliers de croyants.

lundi 11 juin 2012

NOVLANGUE, CHOSIFICATION, VOUS CONNAISSEZ?

Lus dans Cyberpresse ce midi: NOVLANGUE, CHOSIFICATION.  Deux néologismes, en ce qui me concerne, utilisés par Mario Roy, l'éditorialiste de La Presse. 


Le discours des étudiants, d'abord fondé sur une argumentation de nature économique relativement sophistiquée, a graduellement cédé le terrain à la novlangue anticapitaliste, extraordinairement simpliste, qui nous est assénée depuis un siècle, mais que chaque génération croit avoir inventée.



Enfin, sommer la population de prendre parti par tous les moyens, y compris violents, que justifie la prémisse du «tout est politique» est un viol du droit le plus fondamental, peut-être, que possède tout individu. Celui d'être laissé seul.
En paix.
À l'abri, lorsqu'il le désire, de la chosification politique.




NOVLANGUE


=nom féminin (mot anglais créé par G. Orwell dans son roman 1984


Larousse:  «langage convenu et rigide destiné à dénaturer la réalité»




CHOSIFICATION


C'est l'action de chosifier.  Chosifier, c'est «RÉIFIER», 
c'est-à-dire prêter les attributs d'un objet, d'une chose à un homme. 


NOVLANGUE, CHOSIFIER, RÉIFIER...  Ouais!  Tout un éditorial.  Qui, pensez-vous, va pouvoir suivre l'éditorialiste qui s'adonne à un tel langage ésotérique?  


On peut chosifier un patient, Gibus, le sais-tu?  Le traiter comme un poulet acheté à la boucherie, ou comme un boîte de biscuits Ti-Coq...


Delhorno